Dans le sillage de la tendance du ‘guochao’ (国潮) favorisant les marques chinoises à forte identité nationale, ce concept de « maquillage oriental nourri d’essences florales » tel que défini par la marque, fonctionne plutôt bien. Les ventes de Florasis auraient atteint en 2020 les 3 milliards de yuans (420 millions d’euros), dépassant celles de Perfect Diary, l’autre licorne chinoise du maquillage, selon la presse chinoise qui tente d’analyser le phénomène.
La même année, sur la plate-forme de vente en ligne Tmall, les parts de marché de Florasis et Perfect Diary (groupe Yatsen) atteignaient respectivement 16,35% et 14,88% parmi les marques de maquillage, selon Daxue Consulting. La percée de Florasis est attribuée par la plupart des médias au partenariat avec Li Jiaqi, l’influenceur star des ventes en live-streaming qui a obtenu des scores élevés dès 2018 avec la poudre libre et le rouge à lèvres sculpté.
Réseaux sociaux chinois et occidentaux
Ce partenariat étroit est à la fois une force et une faiblesse pour la marque, selon 36Kr (36氪) qui y voit une dépendance excessive. Le site financier chinois souligne par ailleurs la forte présence de Florasis sur tous les réseaux chinois. Les produits Florasis sont notamment disponibles sur Tmall, JD.com, Vipshop, Pinduoduo, Koala, Xiaohongshu et Kuaishou.
Ce dynamisme a permis à Florasis de percer sur les marchés étrangers. Lors du Singles’ Day 2020, Tmall indique que des consommateurs de plus de 100 pays et régions ont acheté des produits Florasis sur la plate-forme, permettant à la marque d’être la plus vendue des marques chinoises toutes catégories confondues à l’international. En mars 2021, la marque a fait son entrée sur Amazon Japan, où elle profite de l’engouement local pour le « maquillage de style chinois », une tendance que le magazine Jing Daily analyse comme symptomatique d’une perte de vitesse des cosmétiques coréens et japonais au profit de la C-beauty.
L’an dernier, Florasis, qui vend directement aux consommateurs sans passer par des détaillants, a été la marque de beauté la plus vendue sur Douyin - la version chinoise de TikTok - selon les chiffres de sa maison mère ByteDance, relayés par le South China Morning Post. Un jeune réseau que le journal détenu par le groupe Alibaba estime encore peu investi par les marques internationales.
Femmes actives et cultivées
En Chine, la presse chinoise souligne la différence essentielle entre Florasis et Perfect Diary en termes de réseaux sociaux et de marketing. Alors que Perfect Diary se focalise principalement sur Xiaohongshu comme base principale avant de se déplacer vers d’autres plates-formes grâce aux recommandations et tutoriels de beauté de la première vague d’utilisateurs, Florasis utilise en priorité la vente en live-streaming sur Taobao. C’est ici que le positionnement des deux marques divergent : Perfect Diary se concentre principalement sur les étudiantes, les femmes urbaines des métropoles et des petites villes, tandis que Florasis cible les femmes actives et cultivées.
Florasis présente aussi une gamme plus resserrée que Perfect Diary avec des prix plus élevés. Le prix de la poudre libre Florasis est d’environ 150 yuans, ce qui la situe entre les 50 à 100 yuans de Perfect Diary et les 250 à 300 yuans de Givenchy, Nars ou Make Up Forever. Le succès de Florasis témoigne donc d’une montée en gamme des marques chinoises de cosmétiques qui viendraient progressivement menacer les grandes marques internationales ancrées sur le haut de gamme.
La marque met en avant « sa R&D et le cycle de développement des produits de un à deux ans, plus long que pour certaines marques internationales ». Une caractéristique qui pourrait pourtant être perçue comme un handicap dans un marché du maquillage ultra réactif et compétitif. Autre point qui pourrait désavantager la marque, selon certains experts en marketing : cet acteur 100% DTC (direct-to-consumers) ne dispose pas de boutiques physiques où déployer son univers visuel et narratif sophistiqué.